Carnaval de Rio : l’école Beija-Flor financé par une dictature ?
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Comme tous les ans au Brésil, le carnaval fait parler de lui avec ses danses endiablées, son concours de samba et ses couleurs vitaminées. Pour les touristes, le carnaval est une occasion rêvée pour faire la fête à la brésilienne et vivre un évènement unique qu’ils ne vivront pas de sitôt dans leur pays. Pour les Brésiliens, même si l’esprit de fête domine, il y est également question de compétition qui jugera toutes les écoles de samba qui défileront au sambadrome. Cette année, l’école Beija-Flor a été sacrée championne et au-delà des joies et du fair-play, leur victoire éveille les critiques des médias et des réseaux sociaux.
Beija-Flor
Depuis qu’Oscar Niemeyer a construit le Sambadrome en 1984, Beija-Flor ou baise-fleur, en français, est l’école de samba qui a remporté le plus de titres au Brésil. Porter son image est pour la majorité des danseurs une fierté, même si à une époque (en 1970), Beija-Flor a plus brillé par des reprises de réalisations de la dictature militaire.
Soulignons que l’école est née est Nilopolis, une ville de la banlieue nord et de la cité carioca. Elle regroupe actuellement un peu plus de 4 000 danseurs.
Le carnaval
Durant le carnaval, les 500 quartiers du Brésil organisent tous des fêtes, mais le clou de l’évènement reste le défilé au Sambadrome. Durant ce défilé, toutes les écoles de samba du pays vont défiler et danser sur un thème précis. Chaque école aura alors à sa charge l’invention de la chorégraphie, la mise en scène du spectacle proposé et bien sûr toutes les dépenses relatives au spectacle dont les tenues. Pour briller et se démarquer le plus possible, les danseurs créent des tenues colorées et scintillantes qui ne sont pas du tout bon marché. C’est la raison pour laquelle, les écoles cherchent des financements et pour en trouver, il ne leur faut généralement pas aller loin.
Le financement
Les « bicheiros » sont depuis toujours des généreux donateurs durant le carnaval. Ont ensuite débarqués des mécènes et sponsors privés. En 2014, on a remarqué que huit des 12 grandes écoles de samba ont reçu un financement de la part de donateurs souvent anonymes. Pour l’édition 2015, la rumeur court que Beija-Flor aurait été financée par le président Teodoro Obiang Nguema, véritable dictateur en Guinée équatoriale.
Beija-Flor se lie à un dictateur ?
Oui, Beija-Flor aurait bien été financée par le président Obiang et son fils, Teodoris Obiang. En tant que mécènes privés, les deux hommes en ont bien le droit, mais c’est leur mauvaise réputation qui a choqué le public. En effet, le père et le fils Obiang font actuellement l’objet d’une enquête pour corruption et blanchiment d’argent. Dans le cadre du carnaval, ils auraient alors donné près de 10 millions de reais, soit trois millions d’euros, à l’école Beija-Flor.
Un montant colossal qu’aucun mécène ou sponsor n’a jamais versé pour soutenir une école de samba dans toute l’histoire du carnaval brésilien. Face à cette information, le service de presse de Beija-Flor a confirmé que l’école a bien reçu une aide de la Guinée équatoriale, mais seulement de nature culturelle et textile.
Rien n’est moins sûr, car d’autres sources affirment que la somme aurait été versée à l’école par le biais d’entreprises brésiliennes opérant sur le sol guinéen. Quoi qu’il en soit, aucune information n’a été jusqu’ici confirmée, mais cela n’empêche pas l’indignation des internautes. Certains d’entre eux vont même jusqu’à dire que l’année prochaine, Beija-Flor adoptera comme thème la Corée du Nord ou l’État Islamique.
Ce qui est sûr, c’est que le président Obiang et son fils ont déjà payé des musiciens de Beija-Flor en 2014 pour avoir donné un show dans leur loge. Une aubaine pour l’école qui venait alors d’être critiquée pour avoir rendu hommage à un ancien directeur de télévision. L’idée d’un nouveau mécène en la personne du président Obiang daterait-elle de cette époque ?
Beija-Flor rend hommage à l’Afrique
Beija-Flor se défend en déclarant que son thème avait pour objectif de faire l’éloge des beautés et légendes africaines, ni plus ni moins. Il est vrai que les paroles qui ont accompagné le défilé n’ont fait référence à la Guinée que deux fois seulement, mais deux fois où le président Obiang a exigé qu’on y ajoute le mot équatoriale. Aussi, le 16 février dernier, on a pu remarquer que les danseurs de l’école portaient tous le drapeau de la Guinée équatoriale sur leur T-Shirt, preuve de leur alliance avec l’une des dictatures les plus cruelles au monde.
Soulignons que le président Obiang et son fils assistent, discrètement, au carnaval de Rio depuis une dizaine d’années. Pour son séjour au pays, les deux hommes descendent toujours dans les plus prestigieux hôtels et ont une loge privée à leur disposition au Sambadrome.
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